6 January 2021

06.01.2021 Journal #19 – Ecrire est un acte solitaire

Ecrire est un acte solitaire. En tout cas, pour moi. En particulier quand j’écris pour mon roman. J’ai besoin d’être dans ma bulle, complètement coupée du monde, concentrée. Connectée à mon univers intérieur.

Ce matin, dans la newsletter des Glorieuses, Rebecca Amselem rapporte ces mots d’Anaïs Nin qui m’ont percutée de plein fouet : « Je crois que l’on écrit parce qu’il faut créer un monde dans lequel on puisse vivre. Je ne pouvais vivre dans aucun des mondes qui s’offraient à moi : le monde de mes parents, le monde de Henry Miller, le monde de Gonzalo, ou le monde des guerres. Je devais créer mon propre monde, un climat, un pays, une atmosphère dans laquelle je pourrais respirer, régner et me recréer une fois détruite par la vie. C’est, je crois, la raison de chaque œuvre d’art » (Journal, 1947-1955) ou encore : « Si je n’avais pas créé mon propre monde, je serais probablement morte dans celui des autres. » Et ça, c’est exactement ce que je ressens en ce moment.

Le monde des autres m’est difficile à vivre actuellement. Alors, je me réfugie dans mon monde à moi, même si tout n’y est pas joli tout le temps. Ce n’est d’ailleurs pas l’objectif, de vivre dans un monde intérieur tout lisse et plein de paillettes. Mais j’ai besoin de nourrir et de m’immerger dans un univers qui m’appartient : celui dont je possède la clé, auquel j’ai accès à volonté, dans lequel je peux être intégralement, parfaitement, entièrement moi-même.

Le monde extérieur me pèse souvent, et ces derniers mois, c’est de pire en pire. Chaque jour, je me rends compte qu’au fond, une seule chose m’intéresse : les histoires. La fiction. En lire, en voir, en imaginer, en écrire. Explorer l’expérience humaine à travers la fiction, c’est vraiment ce pour quoi je suis faite.

Pourtant, je vois comme ça m’est difficile de l’assumer “dans la vraie vie”. Ca m’est difficile à mes propres yeux : de me considérer avant tout comme une raconteuse d’histoires. Ce que je suis. Ce que j’ai toujours été. Ma part d’entrepreneure m’étouffe depuis quelques semaines. Elle étouffe l’artiste en moi. Elle lui met la pression, elle lui susurre à l’oreille des mots venimeux, des mots dangereux, elle plante des graines empoisonnées.

Je le sais, je la vois faire. Et comme la réalité économique est ce qu’elle est, j’ai du mal à passer outre. Mes besoins d’âme percutent mes besoins matériels et c’est dur à gérer, même si j’adore ce que je fais avec mon activité. C’est juste qu’il y a une différence entre faire les choses purement pour le plaisir et faire les choses pour le plaisir, avec l’enjeu financier derrière. Cette pression financière, et tout le système de marketing et de communication qui va avec, me bouffe. En ce moment. Il y a des moments où c’est plus léger, où je vois tout ça comme un jeu. Mais en ce moment, alors que j’ai envie, besoin de m’immerger dans mon monde intérieur, mes deux casquettes se heurtent de plein fouet.

J’ai regardé une interview de l’acteur Charlie Hunnam il y a quelques jours, dans laquelle il explique que quand il est sur le tournage d’un film, il se coupe entièrement du reste du monde. Il éteint son téléphone, il ne consulte pas ses mails (il n’est d’ailleurs présent sur aucun réseau social), il ne voit personne en-dehors de l’équipe de tournage, pas même sa compagne. Il est totalement immergé dans l’univers du film qu’il tourne. Il se fond avec lui. Cette interview a beaucoup résonné en moi, parce qu’il a exprimé ce dont je rêve depuis longtemps : m’octroyer une période de résidence d’écriture, seule ou avec d’autres écrivant.e.s mais hors de mon quotidien. Surtout hors de mon quotidien.

Alors, je prends mon mal en patience et j’essaie de m’aménager des poches de solitude chez moi pour avancer dans l’écriture, chaque jour un peu plus, un mot à la fois.

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